ATELIER HELIOPSE
L' HELIOGRAVURE NON TOXIQUE STAGES FORMATION/INITIATION
Mes premiers essais avec le DAS remontent aux premiers mois de 2020, et ils ne furent pas très concluants. Je les avais fait alors avec le papier Dragon,. La membrane déposée alors sur le cuivre était très fragile et pleine de défauts, de petits bulles, et déchirée, et il manquait une bonne partie de l'image. Je ne me rappelle plus exactement, mais j'ai fait encore quelques essais sans aucun résultat encourageant. Et finalement, à ce moment, j'ai abandonné ces travaux, persuadé qu'il serait impossible de faire de l'héliogravure sans bichromate.
Mais au printemps de cette même année, nous avons une période très calme et qui m'a apporté beaucoup de temps libre pour chercher la ou les causes de ces échecs successifs avec le DAS.
J'ai eu l'idée d'abord de changer de papier et d'utiliser le papier Phoenix qui ,je pense, a une gélatine certs plus fine, mais plus dure que celle du papier Dragon.
Ensuite, j'ai entrepris de rechercher un nouveau temps d'exposition idéal avec ce papier Phoenix. En effet, j'avais gardé toujours les même réglages en passant du chrome au DAS et c'était peut-être le moment de chercher un autre temps d'exposition puisqu'on avait un autre sensibilisateur. J'ai utilisé une petite image de 4x4 cm que j'ai exposée avec des temps d'exposition variables et avec du papier Phoenix sensibilisé au DAS 3%.
A partir de ces tests qui m'ont permis de trouver le bon temps d'exposition, tout a changé d'un seul coup : la couche de gélatine était de qualité correcte et j'ai pu enfin faire une petite hélio sans chrome.
Ensuite, j'ai eu à résoudre quelques petites difficultés mineures pour vraiment avoir un processus stable et reproductible
la faible solubilité du das, sa cristallisation à base température
la pose d'une trame d’aquatinte sur le cuivre ou sur la gélatine, le bitume ou le colophane
Maintenant, j'ai du mal à comprendre cette obstination à vouloir enseigner un procédé dont on ne trouve plus le sensibilisateur en vente, car le bichromate est interdit depuis 6 ans. Alors qu'il existe un produit non toxique, le DAS autorisé , (diazidostilbène), certes plus cher mais que l'on trouve en vente libre sans aucun autre formalité.
Héliogravure DAS/ Phoenix carbon tissue
Workshop 2 days with John Higginson
DAS ou Diazidostilbène CAS : 2718-90-3
Synonymes : 4,4' - Diazidostilbene-2,2' - disulfonic Acid Disodium Salt Tetrahydrate
Formule chimique : C14H8N6Na2O6S2·4H2O
Réaliser le procédé héliogravure au grain sans utiliser les bichromates alcalins, cela faisait quelque temps que ce projet m'apparaissait comme devant être dans mes cartons.
Prévue depuis déjà bien assez longtemps, l'interdiction de l'utilisation des sels de chrome dans ces procédés alternatifs intervint donc en Septembre 2017, décision Européenne oblige.
Comme une de mes activités principales était, et l'est encore aujourd'hui, de proposer des stages d'héliogravure et de former de nouveaux adeptes dans cette technique assez originale, il me devint impossible d'enseigner une méthode de gravure employant un produit hautement dangereux, et qui plus est interdit à la vente et à l'usage dans nos pays Européens.
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Après des semaines de réflexions et de recherches diverses et variées, dans la littérature essentiellement en ligne sur le Web, j'avais identifié plusieurs pistes possibles pour remplacer ces fameux bichromates toxiques. Il me fallait dons en choisir une et ce fut donc ce fameux DAS (Diazidostilbène) qui, en définitive, était déjà employé par quelques photographes alternatifs et cela avec un certain succès, en particulier le Tirage au Charbon et aussi la Phototypie sur plaque de verre. Ce qui me portait à penser utiliser ce nouveau sensibilisant en héliogravure, c'était surtout qu'il donnait d'assez bons résultats dans ces deux procédés utilisant la gélatine.
Mes premières tentatives furent assez désastreuses et je pensais à peut-être y renoncer, me disant que ce produit, le DAS, ne pourrait jamais remplacer les sels de chrome.
En effet, certes la lumière laissait bien une trace fugace sur le papier gélatiné sensibilisé au DAS, mais rien à faire : le report sur le cuivre se passait toujours très mal et tout semblait voué à l'échec.
En résumé, l'action de la lumière sur un colloïde (la gélatine dans le cas présent) sensibilisé au DAS
semblait n'avoir rien de commun avec ce qui se passait sous l'action des sels de chrome.
Je laissais donc de côté ces travaux quelques temps, un peu désappointé de n'avoir pas de solutions à proposer pour l'avenir de l'héliogravure. Et je me disais que c'est dommage, que dans d'autres pays, hors Union Européenne, on pourrait encore pratiquer cette technique et que chez nous, pays d'origine de la photographie et de la photogravure (Niecephore Niepce), on ne pourrait bientôt plus trouver d'héliograveur.
Mais, c'était sans compter sur ce silence printanier propice à la réflexion, l'idée avait gravé son sillon infernal, et je me suis remis aux travaux sur ce sujet bien précis, l'héliogravure sans chrome.
Utiliser ce métal lourd depuis l'invention de l'héliogravure datant du milieu du 19 ième siècle, cela méritait bien quelques nouvelles tentatives. Paroles de graveur !
Ce nouveau sensibilisant réagit beaucoup moins fortement à la lumière UV, je décidais donc de changer la durée d'exposition, passant par exemple de 2 minutes à 2 minutes 30 secondes, soit 25 % d'augmentation d'insolation et effectivement le résultat fut immédiat : le report gélatine vers cuivre s'est amélioré et de beaucoup.
Mais avant d'aller plus loin, voici quelques détails techniques sur ce produit :
DAS ou Diazidostilbène CAS : 2718-90-3
Synonymes : 4,4' - Diazidostilbene-2,2' - disulfonic Acid Disodium Salt Tetrahydrate
Formule chimique : C14H8N6Na2O6S2·4H2O
On voit donc que ce produit ne contient pas de métaux lourds, mais bien que composé d'atomes pris isolément non dangereux, cela reste un composé chimique nocif par inhalation, contact avec la peau et par ingestion et qui doit être manipulé avec toutes les précautions d'usage ( gants, masque, lunettes et Cie )
Il se présente sous l'aspect d'une poudre amorphe non cristalline de couleur jaunâtre, c'est moins joli que les cristaux de bichromate !
Une des premières particularités : il faut conserver cette poudre à l'abri de la lumière, de la chaleur et de l'humidité : soit au frigo ou mieux au congélateur.
Deuxième particularité : c'est sa faible solubilité dans l'eau : On ne peut guère faire une solution aqueuse au delà de 3,5 % ( voir la fiche technique en PDF pour fabrication de la solution sensibilisante ). Conservée au frigo, j'ai pu constater l'apparition et le dépôt de cristaux ou paillettes dans le fond du flacon, remis à température ambiante, cette cristallisation s'efface, mais j'ai pu stabiliser la solubilité en apportant certains adjuvants ( voir fiche PDF ). Avec les bichromates, on pouvait jouer sur le contraste en réalisant différentes solutions sensibilisantes ( 3,5% 4% 4,5% 5 % ) selon le papier gélatiné utilisé, ici il faudra se contenter d'une seule possibilité. Bien souvent, les héliograveurs n'utilisent qu'une seule dilution de sensibilisant pour des raisons pratiques et préférent jouer sur d'autres variables pour influencer le contraste final. Comme on s'en doutait, la solution préparée sera conservée au frigo en flacon étanche aux UV ou alors on travaillera en lumière jaune.
Troisième point : la poudre sèche est aussi sensible aux UV et à la lumière blanche, donc la préparation de la solution sensibilisante devra se faire en lumière inactinique. Pour des raisons pratiques, j'ai opté pour un filtre jaune appliqué sur le néon plafonnier de mon atelier, ce qui laisse un bon confort visuel de travail, par rapport aux ampoules rouges inactiniques des labos photo d'antan.
La sensibilisation du papier gélatiné :
Mais d'abord de quel papier gélatiné parle-t-on ?
Pour ma part, je ne connais qu'une seule adresse, aux USA, qui fabrique et qui vend du papier gélatiné depuis la disparition des papiers Autotype. Cette entreprise dispose de deux papiers : l'un dénommé Dragon plus épais et un autre Phoenix plus fin. Disposant d'un stock de papier Dragon, j'ai donc entrepris de reprendre mes essais avec ce dernier. En ce qui concerne la sensibilisation, j'ai toujours préféré l'effectuer au bac plutôt qu'au pinceau. j'ai fait mes premiers essais de ce nouveau procédé en utilisant le papier gélatiné Dragon, les premiers résulats furent assez médiocres, j'avais du mal à obtenir les tons intermédiaires les gris moyens, ensuite j'ai fait des essais avec le Papier Phoenix, et là , de suite tout allait mieux. Le temps de sensibilisation le plus efficace pour mon installation UV est de 2 min 15 sec et la température idéale de la solution de DAS à 3 % est de 13 °C environ, donc il faut sortir la solution assez longtemps . Le séchage du papier sensibilisé est beaucoup plus long environ 2 heures selon les conditions climatiques. Par la suit j'ai fait des essais concluants en fabricant mon propre papier gélatiné.
Préparation du film positif :
Il n'y a rien de changé par rapport à l'héliogravure tradionnelle au bichromate, le principe du traitement de l'image reste le même : une bien nette et bien définie, un bon contraste de départ, réduire les noirs car il doivent laisser un peu de lumière et assombrir les derniers gris pour qu'ils puissent être gravés .
Choix de l'aquatinte indispensable à la gravure : mon choix préférentiel va vers l'aquatinte au bitume, sans hésitation, pour sa finesse, sa robustesse une fois fixé, et aussi la possibilité ultérieure d'utiliser l'alcool dans la suite des opérations.Face à ses détracteurs, qui à juste titre connaissent l'éventuelle toxicité du bitume de Judée, il faut savoir qu'ici, il n'est pas question de monter dans des températures importantes lors de la mise en place du grain de bitume sur le cuivre. De ce fait, il n'y a pas de fumées toxiques dégagées, il s'agit d'une simple fusion des grains de bitume et en faibles quantités. On peut aussi envisager l'aquatinte à la résine au colophane, mais alors l'emploi de l'alcool dans les opérations à venir sera impossible.
Exposition UV: prévoir 25 % plus longue que pour le bichromate
Hydratation, Adhésion, Développement : rien ne change de façon notable, excepté une température légèrement moindre pour l'eau du développement : environ 50/ 53 °C
Gravure au perchlorure :
Le processus suivant, c'est la gravure au perchlorure, après avoir protégé les bordures et le dos de la plaque comme il se doit. Rien de nouveau par rapport à l' héliogravure classique : on grave en commençant par les noirs, puis les gris foncés et moyens pour finir par les zones les plus grises légères toujours avec des bains de perchlorure de plus en plus dilués.
Voici quelques photos pêle-mêle d'un de premiers essais d'héliogravure au das, sur un petit format de cuivre pour tester. La qualité n'est pas encore au rendez-vous, mais on obtient un résultat encourageant permet d'espérer un progrès: